Pour le tournoi, Le Coq m'avait préparé une série de tenues avec plusieurs couleurs. Ma préférée, c'est la jaune, avec le petit liseré sur le short. C'est mon habit de lumière. Quand je l'enfile, je suis au top. Du coup, je la garde pour les gros matchs.
Trois jours avant le début du tournoi, je ne parviens déjà pas à dormir plus de cinq heures par nuit. J'arrive sur le premier match, je suis une pile électrique, je n'en peux plus d'attendre, je suis prêt à en découdre.
J'étais en pleine forme. Pour préparer Roland, avec Patrice Hagelauer, mon entraîneur, je me souviens d'avoir fait la plus belle séance d'entraînement de ma vie. Il m'envoyait des balles gauche, droite, gauche, droite, amortie, lob, amortie, lob, gauche, droite, gauche, droite, amortie, lob, amortie, lob, gauche, droite, gauche, droite... Je ne sais pas combien de balles peut contenir un chariot de supermarché, mais ce jour-là, j'ai vidé tout le chariot. Sans m'arrêter. Je l'ai fait une fois dans ma vie, et c'était le jeudi avant le premier tour.
Ça m'a donné confiance en moi. Parce qu'il ne faut pas se mentir, tu as quand même un peu la trouille quand tu es sur le court. Le moment le plus dur, c'est quand, entre les points, tu demandes la balle aux ramasseurs. A ce moment précis, tu sens que tout le monde regarde ta gueule. Tu te retrouves un peu à poil. Et à l'époque, en plus, on avait des espèces de petits shorts moulants. Tu es obligé d'avoir une protection. C'est pour ça que la plupart des joueurs ont des tics. Moi, la semaine d'avant, j'avais trouvé plein de poignets Bob Marley aux puces. La classe. J'étais rasta. Yannick Noah mai 2013