- Le Premier ministre australien a répliqué dimanche aux accusations de « duplicité » formulées par Paris sur son intention de rompre un contrat d’achat de sous-marins signé en 2016, un contrat de 90 milliards de dollars australiens (56 milliards d’euros) pour la fourniture à l’Australie de 12 sous-marins à propulsion diesel, souvent qualifié de « contrat de siècle » en raison de son ampleur et de sa portée stratégique.
« Le président Biden a demandé à parler au président de la République (Emmanuel Macron) et il y aura un échange téléphonique dans les tout prochains jours », a indiqué le porte-parole du gouvernement français Gabriel Attal. « On veut des explications » sur ce qui « s’apparente à une rupture de confiance majeure », et aussi savoir « comment ils entendent sortir de ce contrat », avec des « compensations » à la clé, a-t-il précisé sur la chaîne de télévision BFMTV.
La décision de l’Australie d’annuler le contrat d’achat de sous-marins français en faveur de navires américains à propulsion nucléaire a suscité l’indignation de Paris. Emmanuel Macron a rappelé les ambassadeurs de France à Canberra et à Washington dans un geste sans précédent. Il s’entretiendra avec eux dimanche soir, a ajouté Gabriel Attal.
Canberra aurait fait part de ses préoccupations
Plus tôt dans la journée, le Premier ministre australien Scott Morrison avait rejeté les accusations françaises de duplicité.

Les sous-marins à propulsion nucléaire sont notamment plus autonomes que les sous-marins à propulsion conventionnelle (diesel-électrique).
Le ministre de la Défense Peter Dutton a de son côté insisté sur le fait que Canberra avait été « franc, ouvert et honnête » avec la France sur ses préoccupations concernant l’accord, qui a dépassé le budget et pris des années de retard. Il a déclaré avoir personnellement exprimé ses préoccupations à son homologue française, Florence Parly.
Florence Parly : « Nous n’avons jamais été mis au courant des intentions australiennes. Ses affirmations sont inexactes », a rétorqué la ministre française, en marge d’un déplacement à Niamey.
Samedi, le ministre des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian avait évoqué sur la chaîne France 2 une « crise grave » et dénoncé une « duplicité » de Canberra et Washington. « Il y a eu mensonge, il y a eu duplicité, il y a eu rupture majeure de confiance, il y a eu mépris donc ça ne va pas entre nous », a-t-il déploré.
Le rappel de l’ambassadeur français à Londres, qui fait également partie du pacte de sécurité, a été jugé inutile : « On connaît leur opportunisme permanent », a ironisé le ministre des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian, quelques mois après le Brexit.
Pour sa part, la nouvelle ministre britannique des Affaires étrangères, Liz Truss, a défendu dans une tribune l’approche de Londres, qui entend « faire preuve de fermeté dans la défense de nos intérêts ».
Le ministre des Affaires étrangères a d’ailleurs jugé que la crise pèserait sur la définition du nouveau concept stratégique de l’Otan, sans pour autant évoquer de sortie de l’alliance atlantique. « L’Otan a engagé une réflexion, à la demande du président de la République, sur ses fondamentaux. Il y aura au prochain sommet de l’Otan à Madrid l’aboutissement du nouveau concept stratégique. Bien évidemment, ce qui vient de se passer aura à voir avec cette définition », a estimé Jean-Yves Le Drian.
« Mais il faut qu’en même temps l’Europe se dote de sa boussole stratégique et ce sera sous la responsabilité de la France au premier semestre 2022 », a-t-il ajouté, évoquant la présidence française de l’Union européenne au 1er janvier.
corsematin / le 20 septembre